samedi 30 mars 2013

Processing vs image analogique

La génération d'images sous Processing est une activité ayant remis en question ma conception de l'image analogique. Les images que j'ai crée à partir de Processing ont un aspect non-manuel. Elles semblent n'avoir pu exister que par un algorithme.
Ma pratique du dessin s'oriente vers un aspect plus sensible mais aussi plus rationnel en certain cas. Je m'intéresse au trait rectiligne et à la manière dont il peut former des trames et comment ces trames peuvent dialoguer avec un dessin constitué de lignes s'opposant à toute rationalité et ordonnancement.
Cette réflexion s'est naturellement prolongée lorsque j'ai découvert les images que l'on pouvait générer sous Processing. 
La question est de savoir comment faire dialoguer une image générée sous Processing avec une image analogique.
J'ai essayer de rationaliser mon propos et de dégager des notions relatives à la communication que pouvait entretenir ces deux types d'images. 
Par exemple une image générée sous Processing peut dominer l'image analogique et ainsi donner un sens singulier au visuel (et vis versa).
Mais l'image Processing peut donner une impression visuelle qui donnera sens à l'image et permettra à cette dernière de véhiculer un message. 
Je note que l'aimerai proposer une série de visuels en relation avec la chasse à l'ours et ce qui s'ensuivit en France pour ne citer que la France.
Je poste ici une sélection d'expérimentations : 



Ces deux images sont une réflexion sur le mouvement que peut introduire une image de type Processing dans un contexte différent. Mais aussi la couleur. N'aurons-nous pas deux lectures ainsi que deux sens différents à la vision de deux images similaires formellement mais chomatiquement divergeantes ?
La première présente une saturation par rapport au rouge et induit une certaine violence dans l'image.
La deuxième déploie une myriade de couleurs douces et apaisantes. L'aspect sanguinaire est éludé.
On peut constater que les deux images sont fortement présentes. Aucune ne domine l'autre.


Voici une image où Processing n'est plus bien important (proportionnellement). L'image générée sous ce logiciel est visible au niveau de l'impact coloré que l'on peut percevoir sur un flanc de l'ours. Le graphisme évoquant une explosion ou un tire est un dessin. Il y a donc une photographie saturée sur laquelle est apposé un dessin complété d'une image Processing. Je pense que cette dernière trouve sa nécessité dans la relation qu'entretiennent la photographie et le dessin. Leur communication est quelque peu brutal et presque graphiquement trop différent pour que les deux éléments fonctionnent correctement. Cette image est une sorte de liaison graphique. L'intérêt de cette image réside peut-être dans le fait que la photographie s'efface devant les deux petits éléments lumineux. Le petit prend le pas sur le grand.
J'aimerai noter que le dessin possède un caractère rectiligne et que l'image Processing est courbe. Pourtant le passage de l'un à l'autre n'est pas choquant. Une expérimentation qui me permet de repenser la place des petits élément ainsi que leur importance dans une image.


Voila que Processing reparaît bien que discrètement. Ce qui m'intéresse avec ce visuel est l'interprétation que l'on peut faire du mélange des deux types d'images. Les petits impacts ponctuant le bas de l'image viennent suggérer l'idée de la chasse, du tire. Je pense que la petitesse de ces éléments ainsi que leur répétition introduisent un aspect graphique et sémantique intéressant.


 Ici une perte d'information de l'image initiale est frappante. Les deux images viennent se confronter plutôt que de dialoguer. On peut aisément constater la différence entre cette image et celle du dessus.
Les deux images à égale importance de par leur force, leur impact visuel semblent lutter pour prendre le pas sur l'autre.



Ce visuel est dominé par l'image analogique. Mais les couleur et l'impression visuelle finale est déterminée en partie par l'images générée sous Processing. Cette dernière influera sur le dessin jusqu'au grain du papier. Presque invisible mais déterminante pour l'aspect visuel final.

dimanche 3 mars 2013

Il est né le 12 février 1924

Le travail du graphiste et typographe français Pierre Faucheux est particulièrement intéressant et marquant. Son amour pour le livre, l'édition, la composition, la lettre et l'architecture lui permet de remettre en question la notion de mise en page ainsi que la conception de la notion d'édition. Son travail révèle un réflexion formelle et conceptuelle de certains supports comme le livre ou la couverture de romans...
Il prend la direction graphique du Livre de Poche dans les années 1960 et propose des visuels pour le moins étonnant.
Pour chaque couverture de cette collection, Pierre Faucheux élabore une relation sémantique entre le livre et le visuel. Une couverture m'a marqué un instant. Elle propose le nom de l'auteur (Jean-François Revel) en une typographie volumique et le titre imprimé en noir. La couverture est beige et la typographie mise en volume l'est également. 
Alors que voit-on ? Quelle sens de la hiérarchie visuelle Pierre Faucheux nous donne-t-il à voir ?
Est-ce la typographie en volume, soulignée d'ombres fortes ou bien celle imprimée en noir que l'on perçoit premièrement ?
Cette proposition de La tentation solitaire de Revel interroge sur la notion de bi-dimentionnalité, de volume imprimée, de hiérarchie visuelle et surement d'audace graphique. La couverture est un travail en soi. En achetant le livre on se munit d'une sorte de petite affiche intéressante à décortiquer.
Cette affiche la voici :




Voyons celle du Bel été de Cesare Pavese. Bien que je ne sache pas si le visuel s'adapte correctement au contenu textuel du roman, je pense que l'image de cette couverture propose une réflexion sur le rapport entre la typographie et l'illustration. 
Une typographie à empattements vient occuper tout l'espace de la page. Le nom même de l'auteur est minimisé bien qu'il se fasse remarquer par sa couleur noire tranchant sur le fond blanc, la couleur jaune de la typo et la sobriété de la composition.
Une photographie déchirée représentant le bas d'un visage féminin vient s'intégrer au visuel. La typographie empiète sur elle, l'intègre dans son espace.
Pierre Faucheux ne scinde pas l'espace de la page en deux parties mais crée une association graphique et chromatique de la typo et de la photo.
A bien y regarder Pierre Faucheux donne à ressentir une certaine excitation dans l'association de lèvres maquillée au mot "BEL". Je pense que cette association sémantique lie de manière encore plus forte la typo à la photo. Un visuel rafraîchissant.




Voici une couverture bien investie ! 
Elle est destinée à un recueil de poésies écrites par Jacques Prévert. L'espace du support est envisagé dans sa globalité mais aussi comme une double page devant fonctionner une fois le livre fermé. Je pense que le sens du mot "Paroles" n'est pas réitéré plusieurs fois mais inscrit de manière différente par jeu typographique, chromatique et rythmique. Les éléments graphiques de la page semblent animés. Un des éléments est intéressant dans sa direction, un autre dans son passage de la quatrième de couverture à la première de couverture en passant par le dos du livre, une autre encore par son passage de la quatrième de couv à la première mais cette fois-ci en glissant sous le dos.
Je trouve notable la conception du blanc dans cet espace en quelque sorte déstructuré.
Une idée de récitation s'inscrit dès la couverture, avec plusieurs rythmes se superposant.




Une quatrième image pour un plaisir typographique. Pierre Faucheux construit (au sens architecturale du terme ?) l'espace avec pour seuls outils la typographie. Des caractères massifs, à l'interlignage et l'interlettrage réduits. Certaines mentions apparaissent ci et là, entre deux caractères. Les espaces vierges fonctionnent de la même manière, ce qui désature un peu l'espace. Le jeu chromatique est notable dans le sens où le noir constitue le fond d'une des pages puis devient constitutif des caractères des pages suivantes. Le vert vient dynamiser le tout créant une sorte d'accident chromatique, soulignant de ce fait le nom de l'auteur ainsi que le titre du document.
Pierre Faucheux joue avec les conventions et apporte une nouvelle manière de penser l'espace d'un support.